Le Père miséricordieux
Chers amis,
Le Seigneur nous donne, à travers sa Parole de ce Dimanche, à méditer sur la gratuité de la miséricorde de Dieu qui nous invite à la fête. Saint Paul nous donne le ton : « Le Christ m’a pardonné » et c’est pour lui motif de la joie, parce qu’il se reconnaît aimé, bien qu’il ne l’ait pas mérité. « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, mais c’est moi qui vous a choisi… ». Pourtant, notre relation est souvent troublée par le péché et cela nous empêche à voir la vraie image de ce Père qui nous aime malgré nos infidélités. Méditons ensemble ces deux aspects : la crise de relations et la découverte de la miséricorde de Dieu, source de notre vraie joie.
Première piste : la crise de relations.
Un homme avait deux fils.
Nous avons maintes fois médité cette parabole en focalisant notre attention sur le premier fils, le cadet et en contemplant sa « conversion ». Mais je pense que Jésus veut nous dire plus : il ne fait pas que décrire la contrition d’un pécheur. Si cela était le cas, cela n’aurait pas scandalisé les pharisiens qui sont habitués à la Bible qui parle du Dieu qui pardonne un pécheur repentant. Il faut aller encore plus. Allons-y !
– Le premier fils= le cadet.
Il n’a pas la vraie image de son Père. Il le « tue » parce qu’il demande sa part d’héritage du vivant de son père. Il ne pense qu’à lui-même. Il ne fait qu’exiger, réclamer revendiquer… Le voilà qui s’en va. Il est vraiment l’image que se font ces Pharisiens qui ont donné une « belle » (belle selon nous !!) étiquette à Jésus : « cet homme fait bon accueil aux pécheurs, il mange avec eux ».
Ce fils qui s’éloigne tombe au plus bas de l’abjection : il s’est vendu comme esclave à un païen, il n’observe plus le Sabbat, il est allé garder les porcs. Du point de vue humain, il est sous la moyenne : sexe, fric, bouffe… (plaisir, richesse, ventre)
Faut-il vraiment parler de conversion ? Voyez qu’il ne continue même là qu’à avoir pour dieu son ventre : il aurait voulu se remplir le ventre… Son retour à la maison est envisagé sous cette même perspective : retrouver de quoi manger comme les ouvriers. Cela le pousse à préparer quelque chose qui puisse émouvoir son père. Je me demande si ce n’est pas mon cas ! Quand je vais me confesser par ex., non parce que je suis mû par la miséricorde de Dieu, mais parce que je me demande ce que penseront ce qui me verront à la messe sans pouvoir communier, …
La faim qu’il ressent n’a rien d’un repentir radical. Il cherche encore dans les biens matériels, il regarde vers les caroubes que mangent les porcs : en effet, «il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien ». La faim qu’il ressent est donc bien une faim liée à la relation. Car rien ne l’empêchait de se servir lui-même dans l’auge des porcs, la surveillance n’était pas des strictes, je pense ! Sa souffrance vient du fait que personne n’avait le souci de lui, personne ne l’aidait à rassasier sa faim. C’est alors qu’il pense à son père. Sa chance est là, la victoire est déjà acquise. La relation n’est pas encore renouée, mais déjà, par son imagination, il parle à son père. Son raisonnement est simple : Les ouvriers ont du pain car ils le méritent par leur travail. N’ayant pas su trouver la relation juste qui lui aurait attiré l’attention de son père, il décide de renoncer à son statut de fils et de se présenter comme ouvrier. Il cherche à attirer l’amour de son père, tout au moins le mériter désormais.
– Le fils aîné était aux champs.
Il n’est pas différent du cadet. Il est également prisonnier d’un esclavage. Celui du travail.
La scène se passe au soir du retour du fils prodigue. Le fils aîné rentre de sa journée de travail, quand « il entendit la musique et les danses ». L’indice est saisissant. Voilà un homme qui n’a jamais voulu être attentif à ses moindres désirs, même les plus légitimes. Il n’entre pas pour danser. Est-il « ascète » ? Osons dire qu’il ne sortait même pas, ne prenait pas de pause. On aurait dû dire qu’il était assidu. Il s’est bâti un code de vie extrêmement rigide, auquel il lui fallait être absolument conforme. Le pire est qu’il l’a fait croyant plaire à son père.
Il est évident que dans de telles conditions de vie, la colère gronde dans son cœur depuis longtemps et ne cherche qu’une occasion pour s’exprimer. Ce soir, la rencontre est trop brutale, il explose : « tu ne m’as jamais donné un chevreau pour festoyer avec mes amis ». La question porte-t-elle vraiment sur le chevreau ? Probablement pas. On est en train de manger plus qu’un chevreau ! Ce sont ses amis qui lui font défaut, des amis pour faire la fête. En a-t-il seulement? Esclave de son travail, il a négligé toute relation. Il en souffre et le reproche maintenant à son père pour qui il travaille.
Dans la prison qu’ils se sont construite, les deux frères partagent le même fantasme. Le cadet voit les ouvriers manger à leur faim, l’aîné voit le cadet faire la fête. Mais aucun des deux ne voit l’amour gratuit d’un père bienveillant qui court à leur rencontre.
Seconde piste : la gratuité de la miséricorde de Dieu qui invite à la joie.
Pour les deux, l’attitude du père est en effet identique. Il sort. Il sort de sa maison et va vers eux. Il court vers le cadet, il supplie l’aîné. Il veut les faire entrer dans sa joie. Rappelons nous que l’Evangile nous parle de deux autres paraboles. Pourquoi lire ensemble l’histoire de la brebis égarée, de la drachme perdue, et celle du fils prodigue ? Qu’y a-t-il de commun entre un mouton, une pièce de monnaie et un jeune insensé ? Rien. La brebis est sans intelligence, comme le jeune homme, mais elle n’a pas péché ; le jeune homme était perdu, mais la pièce d’argent ne se perd pas elle-même, c’est nous qui la perdons. Par ces paraboles, Jésus ne cherche pas à attirer l’attention sur le désir de conversion du pécheur, mais sur le désir de Dieu de nous faire miséricorde. Dans les trois paraboles, Dieu laisse tout pour courir à la recherche de celui qu’il a perdu. Dieu a le désir de nous sauver, il en a l’initiative, il le veut et il le fait. C’et un Dieu différents de celui qu’on décrit les philosophes : un Etre immobile, stable, immuable. Voici un Dieu qui « bouge », qui se meut, à la recherche de ce qui est perdu, quand bien même ce dernier n’y pense pas. Comme celui qui erre se fatigue et tombe, il ne reste que le mettre sur les épaules, comme la brebis égarée.
C’est cette image que nous avons du père prodigue. En effet, « comme il était encore loin…. » : le fils n’a pas encore ouvert la bouche. Nous avons un geste vraiment inhabituel : un supérieur qui court à la rencontre d’un subalterne, surtout quand celui-ci a eu un comportement indécent. Il ne veut pas d’abord savoir si son fils manifestera une vraie contrition, s’il a prévu des démarches de contrition ou d’expier sa faute,… nous sommes devant une gratuité infinie. Le père fera la même chose pour l’aîné : il sort, il le supplie… Que pensons-nous, quand il faut nous réconcilier avec les autres ? «Ils doivent reconnaître leur tort… ils doivent me demander pardon… ils doivent garantir qu’ils ne reprendront pas… ils doivent me donner un signe, quelque chose en signe de réparation… » : qu’est-ce qu’on n’aura pas entendu ? Sommes-nous différents des pharisiens dont parle saint Luc ? Je pense à mon pays, le Burundi de l’après-guerre et la réconciliation : il y a encore à cheminer.
Aujourd’hui, Jésus nous donne une leçon : Que signifie être fils/filles ? Ce n’est pas d’abord le fait de le mériter, d’avoir telle ou telle autre attitude envers nos parents, mais d’être TOUS aimés par ces derniers, quelles que soient notre dignité ou indignité. Rappelons-nous l’image d’Osée : Dieu qui continue à aimer son épouse infidèle. (Osée 3,1 ; 11,1-9 ; 14,5-9). On comprend alors pourquoi les pécheurs couraient derrière Jésus qui leur a révélé un tel Dieu. On comprend la déclaration de saint Paul : « Le Christ m’a pardonné » s’exclame-t-il. Dieu est notre Père, et il nous aime tous, les bons comme les méchants, ceux qui ont fait du mal comme ceux qui « ne se reprochent de rien », (si vraiment il y en a !) et qui se mettent du côté des offensés. Mais, sommes-nous frères ? Sommes-nous prêts à entrer dans la fête avec l’aîné ? Sommes-nous prêts à partager la joie avec les autres, comme la pauvre femme qui n’a pas 100 brebis, mais seulement 10 pièces de monnaie ? Et si cela n’était pas le cas, que savons-nous vraiment de la Bonne Nouvelle qui nous parle d’un Dieu dont la joie est de nous voir TOUS réunis autour de lui, à nous faire fête ?
[…] Justement, n’est-ce pas le silence du père qui a touché son fils ? Le père n’a pas réagi. Sans doute qu’après l’avoir quitté, le fils s’est-il rappelé la conversation, et a-t-il revu le visage étonné de son père. Son regard sans reproche, sans rancœur. Un regard qui s’étonne simplement de ce que le fils choisisse d’agir ainsi. « Est-ce ma conduite qui est étrange ? N’est-ce pas plutôt la vôtre ? » En un mot, le père n’a pas répondu à la défiance par la défiance. Il n’a pas monté le ton, il n’a pas manifesté son autorité pour obliger son fils à lui obéir. Le fils aîné a fait un bras de fer… mais seul. Le père, lui, l’a laissé partir, comme jadis le père du fils prodigue… […]
J’aimeJ’aime
[…] publicain nous enseigne donc que la justice de Dieu est sa bonté, généreuse et gratuite, qui donne sens à nos existences en nous reconnaissant comme des personnes quand nous ne recevons […]
J’aimeJ’aime
[…] loin les uns des autres, loin de Dieu. Et cet isolement continue même au-delà. Nous pouvons relire la méditation sur le crise des relations : le fils cadet vit un enfer parce que loin de son père, loin d’une famille, d’une […]
J’aimeJ’aime
Merci beaucoup pour cette richesse spirituelle. A travers votre méditation, moi aussi j’ai compris que la vraie relation conduit non à la mort mais à la vie.
Que dieu vous bénisse
Seour Seconde N.
J’aimeJ’aime
Urakoze muvyeyi. Umukama akuzigame.
J’aimeJ’aime
merci pour cette méditation!
J’aimeJ’aime
MERCI BEAUCOUP POUR VOTRE PARTAGE
J’aimeJ’aime
Nawe urakoze muvukanyi
J’aimeJ’aime