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Rien ne saurait limiter le rayonnement de l’agir de Dieu. Sa lumière est déstinée à toutes les nations.

AU FIL DU TEMPS (Articles publiés)


Jésus quitte la périphérie du village perdu de Nazareth, situé au milieu des collines de Galilée, pour s’établir dans le centre urbain de Capharnaüm, au bord du lac de Génésareth, qui sert de « carrefour » aux nations, c’est-à-dire un nœud d’échanges commerciaux et de brassage culturel. Il vient habiter au milieu des hommes pour avoir part à leur vie ordinaire. De la même manière, Jésus veut être présent dans notre vie : il vient à notre rencontre, là où nous sommes, avant même que nous ayons eu le réflexe de venir vers lui. L’amour de Dieu, qui veut nous réconcilier avec lui, est prévenant. Nul ne pourrait accéder à Dieu, si lui ne se mettait pas à notre portée. Le Pape François nous dit toujours d’aller de par les routes existentielles du monde à la rencontre des gens qui ont besoin de la lumière. Il préfère « une Eglise accidentée sur les chemins du monde plutôt qu’une Eglise qui ne sort pas, qui reste sûre d’elle même pendant qu’elle s’abîme de l’intérieur ». Avons-nous ce courage de risquer ? N’oublions pas que Jésus commence son ministère après l’arrestation de son cousin. Il prend lui aussi cette initiative qui le conduira à la mort. Mais le premier risque, c’est celui de déménager pour s’installer, non dans la ville sainte (Jérusalem), mais dans la Galilée des nations, dans cette villes aux gens de toute sorte : personnes pieuses comme celles aux mœurs légères, des commerçants qui ne font que courir derrière l’argent,…, bref, la ville de tous les dangers de contamination.

Saint Matthieu nous explique que Jésus « quitta Nazareth et vint habiter à Capharnaüm, ville située au bord du lac, dans les territoires de Zabulon et de Nephtali ». Avec cette précision, l’objectif de l’évangéliste n’est évidemment pas de nous donner des renseignements touristiques, d’autant plus que ceux à qui il écrivait connaissaient parfaitement les lieux. Sa visée est théologique et il l’explique aussitôt : « Ainsi s’accomplit ce que le Seigneur avait dit par le prophète Isaïe ». Et de citer la première lecture que nous avons entendue. Reprenons-la ensemble un instant.

Zabulon et Nephtali sont deux régions situées du Nord.

À l’époque dont parle Isaïe, le royaume d’Assyrie les annexa et les humilia fortement. La honte de la défaite et le souvenir des déportations furent un traumatisme cuisant. Or, le prophète l’annonce fermement, ces souvenirs seront bientôt effacés. La conviction du prophète est si grande qu’il se permet de parler déjà au passé : « sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre une lumière a resplendi ». Autrement dit, à ceux à qui il veut redonner l’espérance dans le Seigneur qui sauve son peuple, Isaïe n’hésite pas à parler comme si le salut promis était déjà arrivé. Telle est bien la force de la Parole de Dieu : elle réalise ce qu’elle annonce. En conséquence, Isaïe considère-t-il que la joie de la libération promise peut légitimement déjà s’exprimer : « ils se réjouissent devant toi comme on se réjouit en faisant la moisson ». Le prophète évoque la joie à venir et invite audacieusement à en vivre déjà, par la foi. 

Le psaume reprend en écho ces encouragements : « J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants. Espère le Seigneur, sois fort et prends courage ; espère le Seigneur ». Pourquoi alors avons-nous peur de ce qui semble aller au-delà de nos forces ?

C’est par la foi qu’on possède les réalités qu’on espère. Le salut promis à Zabulon et Nephtali est la libération qui m’est offerte personnellement. Je le crois.

Il est donc essentiel au croyant de proclamer les psaumes. Le croyant trouve sa force dans cette proclamation qui le dépasse et qui le rend libre parce qu’elle est la vérité. « Le Seigneur est ma lumière et mon salut ». Il redit l’espérance qui l’habite et affirme son accomplissement. Ce faisant, il s’appuie sur le roc et devient un roc pour ceux qui l’écoutent. Ainsi, par la citation qu’il fait de la prophétie d’Isaïe, saint Matthieu nous enseigne que nous pouvons redoubler de joie car non seulement la promesse de libération s’accomplit mais encore elle s’accomplit en Jésus-Christ. Voilà exactement ce qu’il nous dit lorsqu’il explique que Jésus est venu s’installer à Capharnaüm.

Tout en se fondant dans la masse des humains, Jésus sort du commun : il n’est pas comme les autres. Il rayonne d’une autre lumière, là où l’obscurité d’un monde éloigné de Dieu pèse comme un voile de deuil sur les vies des habitants et où les flammes de l’espérance sont éteintes, étouffées ; la vie a perdu sa saveur surnaturelle et la richesse de la vocation individuelle s’est estompée. Le chrétien, appelé à être lumière du monde, ne peut pas se contenter d’être « comme les autres » : en tant qu’enfant de Dieu, il est unique ; en effet, c’est Dieu qui donne l’identité filiale et le sens de la vie, que ni la société, ni les parents, ni l’homme lui-même, dans ses croyances ou ses idéaux, ne pourront donner. Cette identité filiale est à chercher en Dieu et à accueillir dans la foi au Fils par le don de l’Esprit. Elle doit en outre être vécue en communauté, non en solitaire, surtout en notre temps où l’autosuffisance risque de certains risque de leur faire croire qu’ils vivent bien, même quand ils sont seuls.

C’est pourquoi il ne faudrait pas réduire la 2ème lecture à un appel à l’unité dans nos communautés. Ce texte est également à lire dans la ligne de l’évangile de ce jour où Jésus lance un appel à la conversion, où Jésus appelle ses premiers disciples. Saint Paul nous rappelle ainsi qu’au-delà de Paul, Pierre ou Apollos, il y a le Christ. Tous les regards doivent constamment être tournés vers lui. Lui s’est livré pour nous, lui seul nous sauve. Ainsi, quand il appelle ses disciples, Jésus ne cherche pas à réunir des compétences dont il aurait besoin: il rassemble ceux qu’il a souverainement choisis pour être les témoins de son Évangile. Aussi saint Paul peut-il dire : « D’ailleurs, le Christ ne m’a pas envoyé pour baptiser, mais pour annoncer l’Évangile, et sans avoir recours à la sagesse du langage humain, ce qui viderait de son sens la croix du Christ». Ce n’est pas au nom d’une compétence d’orateur qu’aurait acquise saint Paul qu’il a été choisi, mais pour annoncer un Messie crucifié, folie pour la sagesse du monde.

En rentrant dans notre vie, Jésus ne reste pas cantonné dans un espace réservé, étranger à la vie réelle et aux soucis quotidiens. Notre foi ne doit pas se laisser enfermer dans l’église que l’on fréquente une heure par semaine ou les quelques minutes de prière quotidienne, comme si Jésus n’avait rien à voir avec nous le reste du temps. Il veut être « compagnon » de toute notre existence, remplir notre vie comme l’air remplit tout l’espace, afin que l’on puisse respirer. « Venez derrière moi », nous dit Jésus. Il n’a pas dit « venez avec moi » comme si nous marchions d’égal à égal. Il dit « venez derrière-moi », c’est-à-dire : « devenez mes disciples », ou encore : « mettez-vous à mon école». Il nous invite à entrer dans une relation de maître à disciple. La conversion que Jésus demande est donc un abandon de nos revendications, de nos désirs d’autonomie, de nos choix de mort qui ont enténébré le monde. Cette conversion est le choix d’un maître à suivre et à imiter, elle est le choix exclusif de Dieu.

Notre plus grand émerveillement à l’écoute de cet ordre de Jésus n’est pas dans le chemin qu’il ouvre vers la vie. Le plus touchant est que cet ordre est également une prière.

Suivre Jésus dans sa vie quotidienne et rentrer dans la dynamique de son amitié ouvre au croyant un vaste horizon d’engagement possible : s’engager avec Jésus ne dépend pas d’une action précise et concrète, comme des actes rituels pour s’auto-justifier ou des œuvres de charité pour se donner bonne conscience ; même si on ne peut pas s’en passer, l’amour du Christ pousse le disciple à un éventail de bonnes actions qui reflètent, par analogie, l’amour inépuisable du Père : enseigner la Parole de Dieu, annoncer la Bonne Nouvelle qui vient de Dieu, guérir les blessures de cœur (et il y en a beaucoup !!) causées par la haine, l’égoïsme, l’orgueil qui viennent de nous et témoigner du royaume de Dieu qui porte son fruit en nous. Le premier commandement – aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force – et le deuxième – aimer son prochain comme soi-même – qui paraissent être au départ des exercices d’amour sur trois fronts, s’unifient en Jésus : à la fois Dieu et homme, l’amour pour Jésus concerne Dieu le Père et tout ce qu’il aime, tout le genre humain dont je fais partie. L’amour de Jésus est à la fois promoteur et perfectionnement de tout acte de charité et de piété ; l’amour de Jésus engendre la crainte révérencielle de Dieu et augmente l’estime du frère. Il rend la relation avec Dieu réelle et l’œuvre de miséricorde féconde, pour le prochain et pour soi-même. La charité de mon pauvre petit cœur est élevée au niveau de l’amour divin qui rayonne dans le monde et amène son royaume. Prions, afin d’en être un instrument et de ne pas être trop « obstacle » à l’action de Dieu.

Merci, Seigneur Jésus, de m’avoir invité à avoir part à ta mission, en vertu de mon baptême, par analogie et à la suite de l’appel que tu adressas à tes apôtres. Augmente en moi la foi, l’espérance et l’amour, afin que je rentre dans la dynamique de ton royaume et que s’établisse un grand réseau de croyants en ce monde, qu’il se convertisse et retrouve la paix et l’harmonie que tu veux rétablir en nous.


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