En chaque cheminement au cours duquel est en jeu une chose importante, tel un choix à faire, à un certain point, on est mis à l’épreuve. La foi et la vocation chrétienne à suivre Jésus ne font pas exception de ce parcours à faire et ces épreuves à affronter. En effet, être chrétien signifie ne pas se dérober à ces épreuves, et sur le modèle du Christ, cela signifie aussi savoir dire en ces circonstances difficiles : que soit faite, non pas ma volonté, mais la tienne (Cf. Lc 22,42). Ceci implique aussi le fait de savoir que l’on n’est pas seul et ainsi être capable de se confier à Dieu qui ne nous abandonne jamais, quand bien même on serait devant l’épreuve ultime : celle de la croix dont Pierre n’entend pas affronter derrière son Maître.
Dans la vie humaine, il existe donc des moments extrêmes au sein desquels personne ne peut nous remplacer. Ce sont des moments de décisions irrévocables, des moments du « oui » ou du « non » libre et responsable. On ne devrait plus être Mr ou Mme « Ouine », c’est-à-dire un oui qui peut finir par être un non. Il faut rester vigilant, parce qu’une réponse positive peut se laisser ruiner par beaucoup d’autres facteurs. Saint Pierre n’est-il pas taxé de « Satan » alors qu’il venait de faire une profession de foi importante ?
Ces moments sont souvent chargés de grande intensité émotive. Souvent, ils nous surprennent et nous trouvent comme impréparés à les affronter. Notre capacité dépendra alors de ce que nous aurons été avant : « igíti kigwa iyó gihengámiye » (l’arbre tombe du côté où il penche). Mais aussi, il arrive que nous nous y préparons. Même là-bas, le moment extrême exige un saut, un bon qui nous lance vers un lieu sans totale garantie : des doutes ne peuvent manquer, voire des doutes sérieux ! C’est cet élan alors, ce saut qui fait que nous prenions une direction plutôt qu’une autre. Des décisions ultérieures seront toujours nécessaires pour confirmer le pas que nous aurons posé précédemment. Il s’agit d’être conséquent à nos choix et notre identité, comme nous le dit l’apôtre Jacques, dans la deuxième lecture.
Qu’est-ce qui nous arrive alors ? Ou mieux, comment devons-nous nous y prendre et occuper notre place ? La réponse nous est donnée à travers cette dure et juste adresse de Jésus à Pierre : « Passe derrière moi, Satan » ! Est-ce que l’on doit pas aller au-delà de la réprimande pour y voir un Jésus qui nous appelle à occuper notre vraie place ? Je le pense ainsi, moi ! En effet, cette réponse à Pierre doit être faite aussi mienne, tienne, nôtre,… en tant que disciples. Où se met le disciple ? Derrière le Maître ! N’est-ce pas cela naturel ?
A la première difficulté, malgré cette proclamation de foi (qui advient en un lieu hautement symbolique: Césarée de Philippe), Pierre tombe. Peut-être par naïveté et grande affection pour Jésus : il n’aimerait pas le voir souffrir ! Peut-être parce qu’il est encore plein des attentes messianiques tel que le concevait son temps : un Messie qui doit régner, écraser les Romains et se faire servir par tous, et non le contraire ! De toutes façons, ce que Pierre ne digère pas, c’est la croix. Il tente alors Jésus et lui suggère de réaliser son plan, et non celui de Dieu. En d’autres mots, il lui suggère de mettre Dieu en arrière plan ! Juste le contraire de l’attitude du disciple qui doit passer derrière le Maître.
Pour cela, se mettre derrière Jésus, c’est accepter que Dieu soit Dieu, et ainsi se purifier des nos idées (souvent idolâtres) qui déforment Dieu et lui opposent des concurrents : la volonté humaine rebelle au plan de Dieu. Il nous faut donc la conversion du cœur et apprendre de Jésus à accepter la croix, scandale et stupidité pour la mentalité mondaine, sagesse selon l’Evangile.
Se mettre derrière Jésus, c’est être attentif aux paroles de saint Jacques qui nous demande d’être conséquents à notre identité en enjoignant la foi aux œuvres que cette dernière anime et les œuvres qui sont inspirées par la foi et qui manifestent cette même foi.
Enfin, et dans le contexte de Césarée de Philippe, se tenir derrière Jésus, c’est parcourir la voie qui démasque l’idolâtrie du pouvoir, de l’avoir, de la considération et des applaudissements (« jete-toi du haut de la tour du temple »= fais le merveilleux, fais-toi applaudir!), et ainsi demeurer attentif à la Parole. Le disciple est celui qui écoute : « le Seigneur Dieu m’a ouvert l’oreille et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé », nous dit le prophète. Ceci pourrait comporter même la souffrance, qui n’est pas un accident de parcours, mais fait aussi partie de la vie du témoin : « je n’ai pas protégé mon visage des crachats… » et cela est possible pour celui qui est convaincu que le Seigneur ne l’abandonne pas.
Puissions-nous toujours répéter ce refrain du psaume responsorial : « je marcherai en présence du Seigneur, sur la terre des vivants », puisque l’on sait que la fidélité du Seigneur ne naît pas d’une spéculation théorique, mais de la concrète expérience de sa miséricorde, envers nos faiblesses et nos égarements.
[…] Quel est le manteau de ma sécurité, de mon orgueil, de ma tiédeur ? A la différence de ceux qui se scandalisent de la passion de Jésus (Pierre et ses amis), lui, il est prêt à suivre Jésus sur son chemin vers Jérusalem. […]
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[…] vulnérable et, lui qui est aveugle, il marche vers Jésus avec assurance. A la différence de ceux qui se scandalisent de la passion de Jésus (Pierre et ses amis), lui, il est prêt à suivre Jésus sur son chemin vers Jérusalem. […]
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