«La paix soit avec vous».
L’Évangile d’aujourd’hui se situe: «après la mort de Jésus, le soir du premier jour de la semaine». Jésus est déjà ressuscité, certaines femmes affirment l’avoir vu, mais que vaut le témoignage d’une femme à cette époque. Les disciples ne veulent pas y croire ou n’osent pas y croire. Ils ont perdu l’espérance et ils se sont enfermés par peur des juifs. Cependant Jésus apparaît au milieu d’eux ; comme souvent, c’est lui qui fait le premier pas, celui qui s’approche en premier. Il aurait pu commencer en leur reprochant leur lâcheté, mais il préfère leur donner la paix. Il ne s’agit pas de n’importe quelle paix, comme cette paix superficielle qu’on peut expérimenter quand notre voisin nous laisse tranquille. Jésus leur donne sa paix, celle qui ne dure pas seulement un court moment mais qui est stable, qui dure même pendant les épreuves. C’est une paix qui chasse toutes les peurs et qui redonne l’espérance. Jésus l’a donnée à ses disciples, mais, aujourd’hui, il veut la donner aussi à chacun d’entre nous.
Le doute de Thomas et l’interprétation des signes de la miséricorde.
Une tradition injuste (ou au moins superficielle) voit en l’apôtre Thomas un incrédule, obstiné à ses idées. Il faut situer bien les choses. Les disciples avaient peur et s’étaient enfermés par peur. Les premiers mots que le ressuscité leur adresse sont « la paix soit avec vous ». Puis, après leur avoir montré les signes de la passion, il leur donne son Esprit. Ils peuvent alors croire en ma miséricorde de Dieu, ils ne doivent plus se culpabiliser d’avoir trahi la confiance de leur Maître. La miséricorde qu’ils ont reçue, ils doivent la faire expérimenter aux autres. Voilà le pas que doit franchir Thomas, en passant des plaies à la miséricorde qui jaillit du côté ouvert de Jésus. Il ne veut pas seulement voir, il n’est pas seulement invité au simple voir. Nous savons que même au matin de Pâques, Pierre a vu des signes, mais en est resté confondu, perplexe ; Marie Madeleine a pensé à un enlèvement, pendant que Saint Jean a cru.
Saint Thomas n’est donc pas en quête d’une preuve de la résurrection. D’ailleurs, il n’est pas dit qu’il a par la suite mis sa main dans les plaies glorieuses de son Maître. En réalité, Thomas demandait un « signe » pour oser croire en la miséricorde. Et le Seigneur le lui donne en lui présentant ses plaies, tout particulièrement son côté ouvert : « Cesse d’être incrédule, sois croyant ! » Thomas peut alors accueillir la grâce et prononcer dans l’Esprit la plus belle confession de foi des Evangiles : « Mon Seigneur et mon Dieu ! ». L’Esprit Saint lui a donné de reconnaître en Jésus, le Fils de Dieu, vainqueur du monde par l’effusion de sa miséricorde dans l’eau et le sang jaillis de son côté transpercé, comme nous le voyons de par les deux faisceaux lumineux que Sainte Faustine a vu sortir du cœur ouvert de Jésus pour illuminer le monde. Maintenant, Thomas aussi a « vu le Seigneur » et a confessé son Dieu. Il sait qu’il est réconcilié avec le Père et peut à son tour devenir héraut de ce pardon dont il est bénéficiaire. Le Ressuscité l’appelle à sortir d’une culpabilité mortifère pour accueillir la vie nouvelle de son Esprit : « La paix soit avec vous». Comment ne pas réentendre ici ces paroles de Jésus à sainte Faustine : « L’humanité n’aura de paix que lorsqu’elle s’adressera avec confiance à la Divine Miséricorde» (Journal, p. 132), autrement dit lorsqu’elle croira que ma Miséricorde a triomphé de tout péché, de toute mort.
En ce jour, où Jésus a promis à Sainte Faustine que ceux qui imploreraient sa Divine Miséricorde recevraient beaucoup de grâces, nous pouvons nous interroger : Ne nous est-il pas arrivé, devant notre péché, de nous enfermer dans la culpabilité d’avoir contribué à crucifier le Seigneur ? Peut-être que les plaies ouvertes de Jésus nous parlent plus de condamnation que de miséricorde ! La figure de Thomas et l’attitude de Jésus à son égard peuvent ici nous être d’un grand secours. Nous aussi avons besoin de « voir » que les plaies de Jésus, que l’eau et le sang jaillis de son côté, nous parlent de vie et non pas de mort.
La nouvelle béatitude des croyants : croire sans voir.
A la profession de foi de Thomas, Jésus répond par de belles paroles qu’il convient de bien méditer : « parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu ». Qu’est-ce qui peut prouver par exemple le pardon des péchés ? Cette béatitude est celle des chrétiens de l’époque de la prédication apostolique, elle est aussi nôtre, en notre époque où nous croyons par l’écoute de la parole, où par le témoignage. Ce témoignage pourrait commencer timidement, comme il en est le cas de la première communauté chrétienne dont nous parle la première lecture. Ce n’est donc pas sur leur force que tout repose, mais la force du ressuscité. Qui aurait cru que ce petit noyau aurait bouleversé l’empire romain et l’histoire du monde ? Aujourd’hui, croyons-nous que notre Eglise est porteuse de message de vie pour tous les hommes, malgré ses déchirements intérieurs, sa timidité, ses tâtonnements, ses inquiétudes ?
L’importance de la parole de Dieu.
La fidélité des premiers disciples construisant l’Eglise se porte sur 4 aspects de la vie chrétienne qui sont indissociables. Ils sont fidèles à écouter l’enseignement des apôtres puisqu’ils sont les garants, avec le message que le Ressuscité leur a confié, de l’adhésion à la foi au Ressuscité. Fidèles à vivre la communion fraternelle: celle-ci va jusqu’au partage des biens, mais comporte avant tout la solidarité de pensée, d’action et de comportement. Fidèle à rompre le pain: cette formule désigne l’eucharistie qui se célébrait dans les maisons. Fidèles à participer aux prières qui se disent au Temple. Comment la communion fraternelle est-elle vécue dans notre communauté, dans notre groupe: partage des ressources, des peines et des joies, recherche pour témoigner ensemble de l’Evangile…?
Encore aujourd’hui, celle-ci est la dynamique de la foi. La parole de la Dieu est la première partie de la célébration eucharistique, cette assemblée qui se réunissait tous les croyants tous les 8 jours (les dimanches) comme nous lisons dans l’Evangile. Cette assemblée vit l’aventure de mettre en relation les évènements de la vie pour les interpréter et les comprendre par la lumière de la Parole de Dieu. Ces évènements peuvent être aussi douloureux, peuvent aussi être persécution, comme nous le dit la 2ème lecture. Par la Parole, nous savons alors à quoi sert avoir la foi. Comme Jésus, le croyant n’est pas à l’abri de la fatigue, ni de la recherche du sens de la vie et des choses, ni de la souffrance. Malgré tout cela, le croyant peut éprouver une paix intérieure qui n’est pas à confondre avec la tranquillité ou l’absence de problèmes. Il s’agir plutôt de la capacité d’affronter n’importe quel événement avec confiance et espérance. La paix signifie donc la force intérieure, qui nous vient du Ressuscité et qui nous permet de vaincre le mal par le bien.
Dieu de miséricorde, donne-nous la paix, qu’elle nous soit intérieure, afin qu’en toutes occasion, nous puissions être des témoins de ta miséricorde auprès de ceux qui doutent de la présence et ta bienveillance. En ce « premier jour de la semaine », que le Ressuscité nous comble de sa paix et de sa joie.