En ce dimanche de la transfiguration du Seigneur, comme Pierre, Jacques et Jean, nous sommes nous aussi invités à gravir le Thabor avec Jésus. Il se révèle à nous comme Fils de Dieu et sa Transfiguration annonce notre appel à partager sa même condition dans la gloire. De par notre foi et notre baptême, nous sommes devenus fils dans le Fils. Les textes d’aujourd’hui sont riches de détails. Voici Jésus, notre Jésus de tous les jours, ruisselant de lumière. Voici Pierre, impulsif et spontané, prétendant monter une tente pour des prophètes morts plusieurs siècles auparavant. Voici ces prophètes des temps jadis parlant paisiblement avec Jésus qui se conduit comme si ces personnages faisaient partie de son quotidien. Voici enfin une nuée et une voix venant du ciel qui parle comme au jour du baptême de Jésus. Nous sommes donc à un commencement.
La transfiguration anticipe et confirme la gloire de la résurrection.
La transfiguration dévoile le corps invisible du ressuscité. En rendant visible sa gloire pour quelques moments au sommet de la montagne, Jésus nous ouvre au monde invisible, mais réel, où nous vivons tous. Montrer que Moïse et Elie y habitent, confirme la promesse qui reposait sur eux, au-delà de la montagne des difficultés qu’ils ont dû affronter. Dieu nous appelle sur une haute montagne pour nous aider à avoir sa perspective sur notre vie. En effet, au sommet de la montagne nous découvrons un horizon plus large que celui que nous pouvons voir à partir de la plaine. Une colline qui semble grande et difficile à gravir à partir de sa base, nous apparaît petite, minuscule, lorsqu’elle est vue d’un sommet plus élevé. De même, face à un problème qui nous semble particulièrement insurmontable, nous ne perdons plus de courage si nous le regardons dans la perspective de Dieu. Contempler notre vie comme Dieu la voit Lui-même nous permet d’accepter le besoin de changer notre façon de faire et de considérer les choses autrement.
Jésus se transfigure devant ces apôtres pour qu’ils embrassent une autre perspective : celle de Dieu. Comme ils se constatent que leur Maître affronte des oppositions et des difficultés : ils pourraient douter et rebrousser chemin. On peut alors donner plusieurs raisons de cette apparition.
– Premièrement, comme le peuple disait que Jésus était Élie ou Jérémie, ou un des prophètes, il apparaît entouré des premiers des prophètes, pour montrer la différence qui existe entre le Maître et les serviteurs.
– Deuxièmement, les Juifs accusaient continuellement Jésus d’être un blasphémateur, un transgresseur de la loi, un usurpateur de la gloire de son Père; pour établir son innocence sur ces deux points, il fait paraître deux hommes qui ont brillé surtout par leur zèle pour la loi, comme pour la gloire de Dieu; car c’est Moïse qui donna la loi, et Élie fut un des plus zélés défenseurs de la gloire de Dieu.
– Troisièmement, il veut leur apprendre qu’il est le Maître de la vie et de la mort, et c’est dans ce dessein qu’il fait paraître Moïse, qui avait payé le tribut à la mort, et Élie, qui n’y avait pas encore été soumis.
– Une quatrième raison que nous fait connaître l’Évangéliste, c’était pour dévoiler la gloire de la croix et calmer les inquiétudes et les craintes de Pierre et des autres disciples à l’égard de la passion; car, comme le remarque un autre Évangéliste: «Ils s’entretenaient avec lui du voyagr qui devait s’accomplir dans Jérusalem» (Lc 9, 21). Il se montre donc au milieu de ceux qui se sont exposés à la mort pour être agréables à Dieu, et pour le peuple fidèle; car tous deux se présentèrent avec fermeté devant deux tyrans, Moïse devant Pharaon (Ex 5), et Élie devant Achab (1Rois18). Il les fait encore paraître dans cette circonstance, pour exciter ses disciples à imiter leurs vertus, c’est-à-dire la douceur de Moïse et le zèle d’Élie.
En montant sur la montagne, Jésus n’a pas d’abord dit aux apôtres ce qui les attendaient au sommet, ce qui est arrivé fut une surprise après une montée ardue, fatigante. Combien de fois nous décourageons-nous devant des difficultés de la vie, comparables à une montée? Mais quelle joie pour ces apôtres pour cette heureuse surprise et avant-goût de la gloire céleste? Une leçon pour nous! Nous devons surmonter donc les peurs qui nous rendent sourds à la voix du Père, dont Jésus vient de nous montrer qu’elle ne cesse de résonner. Pour monter courageusement vers notre Croix alors que la nuée se dissipe déjà et que les saints qui nous accompagnent redeviennent invisibles, il ne nous reste que Jésus, seul. Jésus qui nous parle et qui nous touche. Jésus qui nous encourage : « « Relevez-vous », ressuscitez, accueillez la gloire que le Père vous réserve, accueillez la Vie qu’il vous donne en partage ». Nous avons ainsi nos Thabor, nos rencontres intenses et toujours vivantes avec Dieu, moments de grâce sur lesquels nous appuyer pour poursuivre notre marche vers notre patrie céleste. Dieu ne nous abandonne pas. Dieu ne nous déçoit jamais.
Nous sommes entrés dans la gloire du Père par le baptême.
Nous pouvons remarquer le rapport admirable qui existe entre le mystère de cette seconde régénération, qui doit avoir lieu à la résurrection, lorsque notre corps ressuscitera, et le mystère de la première qui a lieu dans le baptême, où l’âme renaît à une vie nouvelle. Dans le baptême de Jésus-Christ, nous voyons concourir les trois Personnes de la Trinité: le Fils s’y montre revêtu d’une chair comme la nôtre, l’Esprit saint y apparaît sous la forme d’une colombe, et le Père s’y déclare dans la voix qui se fait entendre. De même dans la transfiguration, qui est un symbole mystérieux de la seconde régénération, toute la Trinité apparaît, le Père dans la voix, le Fils sous la forme de l’homme, l’Esprit saint dans la nuée. On se demande pourquoi l’Esprit saint apparut d’un côté dans une nuée, et de l’autre sous la forme d’une colombe; la raison en est que l’Esprit saint manifeste ses dons sous des formes sensibles; c’est ainsi que dans le baptême il donne l’innocence figurée par l’oiseau, symbole de la simplicité; dans la résurrection, il nous donnera l’éclat et le rafraîchissement; le rafraîchissement, figuré par la nuée; l’éclat des corps ressuscités, figuré par ce nuage de lumière.
Les yeux fixés sur Jésus-Christ, notre guide dans la foi. Ecoutons-le.
«Or, Pierre, prenant la parole, dit à Jésus: Seigneur, nous sommes bien ici…». Comme il avait appris de Jésus lui-même qu’il lui fallait aller à Jérusalem, il craint encore pour son Maître; mais après le reproche qu’il en a reçu, il n’ose plus lui dire: «Gardez-vous en bien, Seigneur»; mais il exprime la même pensée sous une autre forme. Il voyait sur la montagne un grand calme et une solitude profonde, et d’après la disposition des lieux, il pense y pouvoir trouver une demeure convenable, comme il le dit au Sauveur: «Nous sommes bien ici». Il voudrait même y rester toujours, et il parle d’y élever des tentes: «Faisons, s’il vous plaît, trois tentes». Il se peut qu’il espérait que s’il pouvait s’établir sur la montagne, Jésus n’irait pas à Jérusalem, et qu’en évitant d’aller dans cette ville, il éviterait en même temps la mort; car il savait que les scribes tramaient son élimination. Il se confiait encore sur la présence d’Élie, qui avait fait descendre le feu sur la montagne (2Rois1, 12), et sur celle de Moïse (Ex 24,23), qui était entré dans la nuée pour parler à Dieu. Ils auraient pu ainsi se dérober à tous les regards et à toutes les recherches des persécuteurs.
Dans le cas contraire, laissons-nous penser qu’à la vue de la gloire du Seigneur et de ses deux fidèles serviteurs, Pierre fut tellement ravi de joie, qu’il oublie toutes les choses de la terre, et qu’il voudrait rester toujours dans cet endroit. Or, si tel fut l’enivrement et le transport de cet Apôtre, quel bonheur de voir un jour le Roi de gloire dans toute sa beauté (Is 33,17), et de se trouver mêlé aux chœurs des anges et de tous les saints? Cette parole de Pierre: «Seigneur, si vous le voulez», pourrait être une preuve tout à la fois de son dévouement et de son obéissance. Il est donc disposé à l’écouter comme le recommande la voix qui retentit de la nuée.
En effet, Simon avait déjà répondu à l’appel du Seigneur et s’était mis généreusement à sa suite ; pourtant c’est ce second appel, dans le dépouillement le plus radical, qui est véritablement fondateur de sa mission. Il a fallu que Pierre apprenne à connaître Jésus en cheminant avec lui, puis qu’à travers sa trahison, il fasse l’épreuve de sa fragilité, avant de pouvoir saisir à la fois la gratuité de l’appel de son Maître, et la radicalité de la réponse qu’il convient de lui donner. Tel est le chemin du disciple et de tout disciple que nous sommes, au-delà de nos peurs et de nos limites.
« Seigneur notre Dieu, tu as fait resplendir ta gloire sur le visage transfiguré de Jésus, ton Fils. Apprends-nous à reconnaître ta présence parmi nous, tantôt éclatante comme le Soleil, tantôt cachée au cœur de ta création. Fais que les évènements de notre temps, souvent tragiques, n’ébranlent pas notre foi en Toi afin que nous soyons ta lumière dans le monde. Ainsi soit-il. »
[…] les trois évangélistes, Matthieu, Marc et Luc s’accordent pour lier l’épisode de la Transfiguration à la conversion que Jésus a eu avec ces disciples. Lors de cette conversation, Jésus, après […]
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