Se préparer à la rencontrer le Seigneur au cœur de notre vie quotidienne.
Comme pour le 1er dimanche, non plus les lectures de ce deuxième dimanche de l’Avent ne focalisent notre attention sur la naissance de Jésus à laquelle nous devons nous préparer. On peut comprendre le pourquoi de cela quand on lit les collectes du missel romain : ‘‘Fais que notre engagement dans le monde ne soit pas pour nous obstacle dans le cheminement vers ton Fils’’ ou bien, dans la collecte alternative : ‘‘redresse tes sentiers dans nos cœurs et aplanis les montagnes de l’orgueil’’ (traduction libre du missel en Italien). Préparer Noël, c’est aussi ne pas fuir notre engagement dans la vie quotidienne, évidemment sans que cela puisse nous détourner de la vraie destination : la Communion avec le Christ, notre Sauveur. Ainsi, nous pourrons chanter à haute voix : « Gloire à Dieu, au plus haut des cieux, et pieds sur la terre, pour ceux qui s’efforcent d’accomplir sa volonté ».
Jésus, vrai homme, dans notre histoire événementielle réelle.
L’épisode de l’Evangile que nous lisons en ce deuxième dimanche nous porte chronologiquement au-delà de la naissance de Jésus. Nous nous trouvons au seuil du ministère public de Jésus, déjà adulte. Jean Baptiste parle de celui qui est prêt à se manifester aux foules et les exhorte à s’y préparer. Luc nous fournit beaucoup de références chronologiques, politiques, géographiques que nous pouvons retracer historiquement. Il nous parle des personnages de notoriété publique, mais aussi peu honnêtes, mesquins, magouilleurs, affamés du pouvoir. En d’autres termes, il nous parle de l’histoire de l’humanité en son côté le plus obscur. Il me parle de mon histoire en ce qu’elle a de moins beau, moins présentable. A moi de voir les coins et recoins de mon cœur : je ne suis pas si différent d’eux ! Par contraste, derrière cette scène des puissants se trouve un autre, puissant et en même temps humble : Jésus de Nazareth. Il est celui qui est venu vivre au sein notre vie, de notre histoire quelque fois lumineuse, quelques fois ténébreuse.
Oui, Dieu n’a pas abandonné l’histoire, il ne déteste pas l’humanité, même dans son côté peu présentable. Il suffit de voir les méandres de sa généalogie que nous lisons au début de la semaine qui débouche directement sur Noël. Il est bien entré dans les plaies et les plis de mon histoire pour la transfigurer. Vivre le temps de l’Avent, ce temps liturgique qui ravive notre, c’est alors s’arrêter de temps en temps pour contempler cette annonce du salut qui vient chez nous, malgré ce que nous sommes, et donc rendre grâce. Dieu vient à la rencontre des fragilités humaines. Pour cela, le temps de l’Avent est aussi le temps de l’attente joyeuse, comme on le méditait dimanche passé. C’est le temps de la joie que le prophète Baruch nous annonce dans la première lecture. Tel est le cadre de la 1ère lecture.
Jean Baptiste, le Précurseur qui crie dans nos déserts : préparez-y le chemin du Seigneur.
Après un regard général sur l’histoire (et sur notre histoire personnelle), Saint Luc nous emmène avec lui au désert et nous y fait rencontre Jean Baptiste. Cependant, il ne s’arrêtera pas longtemps sur sa personne ; le centre de l’attention doit être ailleurs : la Parole de Dieu dont il est porteur. Une parenthèse devrait être faite ici : celui qui nous annonce la parole peut être brave ou moins brave. Où s’arrête notre attention ? Surtout sur tel ministre de la Parole, prêtre, consacré, catéchiste, responsable de communauté…? Fermons notre parenthèse. Retournons au désert, ce lieu du silence et de l’écoute qui nous fait peur (iyó hacīyémwo agacéreré, ubwo ntítukigira ngo : urupfú rurikó ruradúharūra ? Il me semble que notre culture a peur du silence !). Aujourd’hui, plus qu’hier, on essaie de remplir tous nos instants de quelque bruit (musiques, jeux, coups de téléphones pour se faire raconter les derniers commérages et rumeurs sur ton frère/ta sœur, ton/ta voisin(e), etc.), et ainsi, nous sommes loin de nous-mêmes. Que cet Avent nous permette de redécouvrir nos déserts qui nous disposent à accueillir la Parole de Dieu en notre vie, au sein de notre histoire personnelle et communautaire.
Saint Luc met les mots d’Isaïe sur les lèvres de Jean-Baptiste : celui parle dans le désert et parle des déserts. Le désert est un lieu sans références, où l’on se perd facilement. Pourtant, c’est dans le même désert (celui de nos inquiétudes et nos incertitudes, nos peurs du lendemain, …) que crie la voie du Baptiste : une voix qui crie dans le désert, dans nos déserts. Et c’est la raison pour laquelle Jean le Baptiste reçoit des foules qui l’écoutent. Il ne crie pas dans un désert vide, j’allais dire « un désert qui est désertique », mais s’adresse à un désert qui a sa vie concrète, son histoire, ses peurs et angoisses, ses joies, …
Le prophète Isaïe dont les paroles sont mises sur les lèvres du Baptiste ne dit pas que c’est « une voie qui crie dans le désert », mais il invite à préparer le chemin du Seigneur « dans le désert ». Il n’est pas dit que cette voie parle dans le désert ! Qu’à cela ne tienne, tout se rencontre, tout trouve sens ici. Même si le Baptiste de notre texte parle dans le désert, ce dernier n’est plus désert puisqu’il est affolé de personnes qui s’y reconnaissent. Autrement dit, ce désert est le leur, c’est leur vie qui est touchée : « venez au Seigneur, et vos déserts refleuriront », les déserts de votre vie ne resteront plus désertiques, mais pourront porter du fruit. Ici alors commence un autre âge, ici commencent une autre vie. Il s’agit d’une nouvelle genèse, et Noël que nous nous préparons à célébrer a été et est un événement à partir duquel tout est reparti.
Un discernement continu
N’oublions pas cependant que cela advient dans le secret de nos vies, au point qu’il nous faut toujours discerner : nous arrêter un moment et relire notre histoire, sous la lumière de la Parole que Dieu nous adresse continuellement. C’est l’attitude que nous demanderons pour nous et pour les autres comme le dit Saint Paul : « dans ma prière, je demande que votre amour vous fasse progresser de plus en plus dans la pleine connaissance et en toute clairvoyance pour discerner ce qui est important. Ainsi, serez-vous purs et irréprochables pour le jour du Christ, comblés du fruit de la justice qui s’obtient par Jésus Christ, pour la gloire et la louange de Dieu ». Amen.