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Dans l’attente persévérante et fidèle de sa venue, n’ayons pas peur. En ceci consiste notre sainteté : « faire de l’ordinaire de notre vie une merveille ».

IMG_20170723_115313Depuis quelques dimanches (c’est-à-dire depuis la fin du chapitre 9 de Saint Luc qui parle de la montée de Jésus à Jérusalem), nous accompagnons Jésus et celui-ci nous enseigne ce qui fait l’identité du disciple : se conformant à l’enseignement de son Maitre, il se fait proche de celui qui en a besoin, écoute la Parole qu’il s’efforce de mettre en pratique, prie, ne fait pas des biens matériels le centre ultime de son existence.
La liturgie du 19ème dimanche du Temps Ordinaire nous fait méditer sur deux autres caractéristiques de cette identikit, liées entre elles: la capacité de persévérer dans une attente vigilante et la foi courageuse. Ces deux vertus sont possibles si et seulement si notre vie est toute orientée et vécue en fonction du Royaume de Dieu. Plus rien ne peut alors nous faire peur, puisque ce Royaume bien ultime devient ce à quoi tout se subordonne.

N’ayez pas peur, petit troupeau, dit Jésus.

Il n’y a pas de plus terrible que la peur: elle est capable de transformer la personne la plus timide, douce et inoffensive en un être violent avec des réactions peu contrôlables. Plus pervers que la peur, on ne peut trouver. Elle ouvre la brèche à toute sorte de préjugés et suspicion, nous met constamment en situation d’autodéfense, gaspillant ainsi nos énergies par la production d’adrénaline en vue de parer aux éventuelles attaques. Toute personne devient un ennemi éventuel, tout collège se transforme en un concurrent, l’étranger devient quelqu’un de différent en quête de suprématie. L’amour n’est plus possible. Si Jésus invite à ne pas avoir peur, il sait combien cela ruine une vie, rouille la mission, et nous prive de la paix et la joie de vivre. .

Quel est le contraire de la peur? On pourrait directement penser au courage, à l’audace. Mais le sentiment de peur se nourrit surtout de l’inconnu, de « l’on-ne-sait-jamais ». En ce sens, l’opposé de la peur serait la confiance: une confiance calme, désarmée, pleine d’espérance et de bienveillance. Une confiance non tendue à défendre le passé, (suite…)

Fidèles au Règne de Dieu et à l’histoire, malgré les adversités. Confiance. Persévérance.

ruine-temple-jerusalemDimanche passé nous avons entendu comment la fidélité de Dieu est de toujours à toujours. Aujourd’hui, la liturgie nous invite à méditer sur la fidélité de l’homme qui, malheureusement, n’est pas constante. En Jésus-Christ, la miséricorde du Père s’est manifestée dans notre histoire, mais sa venue n’a pas représentée la fin de l’histoire. Le chemin de l’homme continue dans l’aujourd’hui, dans lequel nous sommes appelés à choisir entre ce qui est superflu ou à travailler sereinement, avec persévérance en vue du jour du Seigneur dont nous parle la 1ère lecture. Il nous faut donc être responsable puisque Dieu ne restera pas indifférent à l’injustice, les calculs des mauvais seront sans doute démasqués.

L’attente de l’accomplissement

Ce qui compte, c’est la fin vers laquelle tend toute l’histoire et la sagesse consiste dans le fait de savoir tout subordonner et orienter à cette fin. Les interlocuteurs de Jésus (suite…)

La foi qui agit dans la charité: plus qu’efficace, elle est fidèle et créative.

TalentsLa liturgie de ces dernières semaines de l’année liturgique nous oriente résolument vers l’attente du retour du Christ Roi, que nous célébrerons dimanche prochain. Eclairé rétrospectivement par la parabole des talents, le poème du livre des Proverbes exaltant une femme vaillante peut être lu dans la perspective d’un idéal de vie généreuse, dynamique et ouverte même au risque. Il s’agit d’un poème qui prend toute sa signification si on pense à l’image de la femme de l’antiquité, alors considérée comme « une chose » appartenant à son mari. Pourtant, ce poème décrit les qualités de cette femme, sans omettre même son activité économique qui la sort même du seul horizon familial. C’est un risque, du moins, en ce temps. Comment ne pas oser risquer si on est fidèle ? C’est alors ce qui lie la parabole des talents à cette lecture, quand elle parle de celui qui n’a pas osé risquer, dont la « prétendue fidélité » est restée stérile.

La parabole de Matthieu nous fait pénétrer dans un monde plus complexe, où le mécanisme d’enrichissement annonce étrangement le système capitaliste. Il s’agit de risquer afin de fructifier une somme d’argent, par le travail certes, mais aussi par un choix judicieux en rapport avec le placement. Au temps de Jésus, un talent était un lingot en argent ou en or qui valait 6.000 deniers, c.à.d. l’équivalent de 6.000 journées de travail (Voir 25 ème dimanche T.O – Cfr Mt 20,2 : les ouvriers de la dernière heure). Il faut toutefois comprendre que la pointe de la parabole est dirigée contre la conduite timorée et stérile du 3ème serviteur. En effet, c’est une illusion de croire que le salut puisse résider dans la seule conservation de ce que l’on a. A propos de ce texte, Saint Grégoire dit dans une de ses homélies : « Celui qui a recevra encore, et il sera dans l’abondance. Mais celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il a. » Saint Grégoire commente : « On donnera en effet à celui qui a, et il sera dans l’abondance, parce que celui qui a la charité reçoit aussi les autres dons. Mais celui qui n’a pas la charité perd même les dons qu’il paraissait avoir reçus. Aussi est-il nécessaire, mes frères, que vous veilliez à garder la charité en tout ce que vous faites. Et la vraie charité, c’est d’aimer son ami en Dieu, et son ennemi à cause de Dieu. »

On pourrait penser que nous ne sommes pas concernés par cette conduite du 3ème serviteur. Loin de là ! Qui est alors visé ? Tous ceux qui, devant le message de l’Evangile, refusent les exigences de Dieu et de l’Eglise, en arguant que c’est trop rigide, difficile (pensons seulement au discours de l’indissolubilité du mariage dont on parlait durant le synode !) ; les chrétiens qui enfouissent la Bonne Nouvelle par peur ou risque de se compromettre (bā Ntirûmvéko, « ntā guhāndwa ku rurími ikirēnge kírihó », … ; tous ceux qui reposent sur la bonne conscience de leur baptême et de leur pratique religieuse en pensant que Dieu ne demande pas davantage,… La liste pourrait être longue.

A chacun de nous, le Maître a confié quelque chose et s’en est allé, il s’est éloigné. Voilà bien une situation humaine. Notre vie se déroule sous le signe d’une « absence » de Dieu que beaucoup vivent comme s’il n’existait pas. Il y en a qui ont dit qu’il est même mort (exemple : Sartre, et non seulement. Il suffit de lire Mt 24, 37-44 ; 24,46-51 ; 25,1-13). Oui, le temps de l’absence du Maître est long et éprouvant. L’image que nous nous faisons alors de lui va commander notre attitude. C’est le nœud de ce texte de l’Evangile. Une relation faussée de Dieu considéré comme un tyran dont on a peur, ne pas le considérer comme un père, comme un Dieu qui fait alliance, un Dieu qui veut profiter de nous « en moissonnant où il n’a pas semé ». Est-ce le cas ? Ce Maître a-t-il repris les talents et leurs bénéfices ? Je pense que non ! Laissons-nous surprendre par la parabole encore une fois.

Il y a une surprise qui vient du fait que le seul personnage vraiment préoccupé du retour de son Maître, n’est pas celui qui est cité en exemple. La parabole fait même une large place aux réflexions intérieures du troisième serviteur – à vrai dire très inquiet à la pensée de la confrontation avec cet homme dur dont il redoute le retour. Les deux premiers, eux, ne se posent même pas de question : à peine leur Maître est-il parti, qu’ils reprennent « aussitôt » le travail, sans se faire d’état d’âme, continuant leur activité comme si le Maître était toujours là. Pour eux rien ne semble avoir changé, tant le souvenir de leur Maître demeure vivant dans leur mémoire. De fait : le Maître n’a jamais quitté la maison de leur cœur. Pourtant, c’est bien les deux premiers serviteurs, qui ne se préoccupent ni du départ ni du retour de leur Maître, que la suite du récit désigne comme modèles de l’attitude juste ; alors que le troisième s’entendra reprocher son manque d’initiative, lui qui était tellement préoccupé de ne rien perdre de ce que « ce Maître dur » lui avait confié.

Il donc est frappant qu’à son retour, le Maître ne récupère ni son bien, ni l’intérêt ; il se contente de constater la fécondité des efforts de ces « bons et fidèles serviteurs », et de leur promettre de plus grandes responsabilités puisqu’ils se sont montrés dignes de sa confiance. Bien plus : il les invite à entrer dans sa joie. En outre, rien dans la parabole ne nous permet de dire que le Maître avait moins de sympathie pour le troisième serviteur : chacun a reçu « selon ses capacités », et le serviteur qui a fait fructifier deux talents reçoit la même récompense que celui qui a doublé les cinq talents. Les serviteurs ne sont donc pas jugés sur leur efficacité, mais sur leur fidélité. Or le dernier serviteur n’a pas du tout eu la même attitude intérieure que ses collègues par rapport à son Maître. Loin de lui faire confiance, il s’est défié de lui, a eu peur et ne voulant courir aucun risque, il n’a rien entrepris pour faire fructifier le talent qui lui avait été confié. Lui aussi agit envers le Maître conformément à l’image qu’il s’en fait : il refuse de travailler pour un Maître « paresseux », qui fait travailler les autres pour lui ; aussi se verra-t-il reprocher sa paresse. Il s’imagine son Maître « mauvais », « moissonnant là où il n’a pas semé, et ramassant là où il n’a pas répandu le grain » ; et le Maître lui reprochera sa malice. Le « mauvais serviteur » s’est lui-aussi inspiré de l’idée qu’il se faisait de son Maître, et s’est laissé façonner à son image. Aussi se voit-il renvoyer à son lieu propre : dans les ténèbres, exclu de la joie des fils, et loin de la présence de celui qu’il n’a pas voulu reconnaître comme Père.

Une chose est certaine : le Seigneur vient. Où ? Quand ? Il ne nous appartient pas de le savoir : « Le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit». Dès lors l’attitude qui s’impose est la vigilance : « ne restons pas endormis comme les autres » insiste saint Paul, c’est-à-dire comme les jeunes filles insensées de la parabole des 10 vierges, « mais soyons vigilants et restons sobres » comme les vierges sages qui gardent leur lampe allumée dans l’attente de la venue de l’Epoux. Le vaccin cintre le risque de cette « fidélité stérile » est « la foi agissant par la charité ».

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