Évangéliser les aréopages contemporains

Accueil » Posts tagged 'parabole' (Page 2)

Archives de Tag: parabole

Dieu veut le libre engagement de notre foi pour rendre fécondes nos vies.

En méditant le passage de l’Evangile de ce dimanche, nous découvrons que les deux paraboles que nous propose la liturgie de ce dimanche constituent un diptyque. Jésus souligne ici la mystérieuse complicité entre la Parole de Dieu et l’humanité. Celle-ci semble toute préparée et même orientée vers l’accueil de ce germe divin qui lui donne une fécondité inattendue.

seneve1Par une double présentation complémentaire, Notre-Seigneur veut probablement suggérer la mystérieuse synergie entre la liberté humaine et la liberté divine. Dieu veut avoir besoin de notre foi pour rendre nos vies fécondes : c’est bien notre terre – c’est-à-dire notre vie – qui est appelée à produire du fruit (1ère parabole) ; mais en même temps, le Royaume de Dieu n’est pas de ce monde : il naît d’en-haut, et ne fait que prendre racine dans notre terre pour s’élever jusqu’aux cieux. (suite…)

Dans l’attente de la moisson, mettons-nous à l’école de la patience et « l’humanité » de Dieu.

Chers amis,
Le Seigneur continue pour ce dimanche consécutif à nous parler en paraboles, comme il l’a fait le dimanche passé et comme il le fera aussi dimanche prochain. La parabole du bon grain et de l’ivraie met en relief la sagesse et la patience de Dieu. Non, il ne veut pas que ses ouvriers aillent arracher dès maintenant la mauvaise herbe! C’est aussi à la clémence et à la longanimité de Dieu que conclut le sage qui s’exprime dans la première lecture. Le Seigneur maîtrise sa force et juge avec une sereine équité. Par là, il apprend à son peuple et à nous à « être humain ». Exaltant la patience de Dieu, les auteurs inspirés veulent dénoncer simultanément nos excès de zèle et notre incorrigible propension à exclure et à condamner. Notre bonne volonté de servir le bien ne doit pas devenir une barrière discriminatoire. Evidemment, avec humour, Jésus nous invite à assumer avec réalisme notre condition historique: tous ensemble, nous formons un champ extraordinairement mêlé. Mettons-nous à l’écoute de ces paraboles.

Nous savons que le but des paraboles est de nous faire entrer dans la connaissance des mystères du Royaume, connaissance qui ne désigne pas une plus grande évidence intellectuelle du Royaume (comme nous le disions en ce dimanche), mais une perception intérieure de sa présence active dans le monde. En ce sens, que nous révèlent ces paraboles sur l’action du Royaume dans chacune de nos vies ?« Il en est du Royaume des Cieux comme d’un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Or, son ennemi est venu, il a semé à son tour l’ivraie, au bblé et ivraieeau milieu du blé et il s’en est allé ». ATTENTION! Il y a deux manières de faire l’œuvre du démon : trop en parler si bien qu’on ne pense plus qu’à lui en oubliant que Dieu est le centre de notre vie, mais aussi croire qu’il n’existe pas, qu’il n’agit pas si bien qu’on lui laisse les mains libres pour semer l’ivraie dans notre champ : « pendant que les gens dormaient ».

La parabole nous montre qu’il entre alors en action à deux niveaux. Tout d’abord, directement. Il sème de l’ivraie au milieu du bon grain et crée la confusion entre ce qui est bon et ce qui est mauvais. Face à cette situation de confusion, les directives de Jésus sont claires : « Laissez-les pousser ensemble, de peur qu’en enlevant l’ivraie vous n’arrachiez le bon grain ». Le bon grain et l’ivraie en herbe se ressemblent tellement que nous risquerions de nous méprendre : ce qui apparaît comme de l’ivraie dans les premiers signes de sa manifestation, pourrait bien porter du bon fruit au terme de sa croissance.

En tout cas, l’ivraie est tellement imbriquée dans le bon grain, qu’en voulant enlever l’un, on arracherait l’autre. Ici, Jésus nous met ainsi en garde contre la deuxième manière dont le démon peut nous tenter après avoir jeté la confusion entre le bon grain et l’ivraie: Induire dans notre cœur l’illusion de croire que nous pouvons nous-mêmes, à la lumière de notre propre intelligence, discerner de façon définitive ce qui est bon de ce qui est mauvais, c’est-à-dire que nous pouvons être juge de nos frères et de nous-mêmes, que nous pouvons être juges de la moisson c’est-à-dire de l’œuvre de Dieu dans les cœurs, en définitive, que nous pouvons juger Dieu puisque entre Dieu et son œuvre c’est tout un.

Le piège ici n’est pas de prétendre juger entre le bien et le mal puisque l’ivraie n’est pas du bon grain, et le bon grain ne saurait se confondre avec l’ivraie. Déjà la différence entre le bien et le mal se dégage même dès l’origine: les deux semeurs ne sont pas à égalité. L’un sème en plein jour, l’autre le fait « de nuit » en profitant de l’inattention des gens. Comme il nous est beau d’entendre cela Seigneur. C’est Toi Seigneur qui me dis que le mal qui est en moi et dans les autres n’est pas ton véritable visage, toi qui sèmes en plein jour. Tu me dis qu’il se glisse presqu’à mon insu. Ainsi tu m’invites à la vigilance.

Le véritable piège consiste alors à prétendre juger du bien et du mal de notre point de vue purement humain, c’est-à-dire d’une façon définitive et clôturante à un instant donné, sans rémission aucune, enfermant l’autre ou soi-même dans sa faute sans possibilité aucune de changer. Autrement dit, en faisant l’impasse totale sur la miséricorde divine qui agit dans la durée et n’enferme jamais personne dans les actes qu’il a posés à un moment donné de sa vie.

La patience de Dieu est un des aspects les plus déconcertants de la miséricorde:  » ta force est l’origine de ta justice, et ta domination sur toute chose te rend patient envers toute chose. […] Toi Seigneur, qui disposes de la force, tu juges avec indulgence, tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagement, car tu n’as qu’à vouloir pour exercer ta puissance », lisons-nous dans la 1ère lecture. Le Seigneur croit en nous, il espère en nous : « Par ton exemple, tu as enseigné à ton peuple que le juste doit être humain, et tu as pénétré tes fils d’une belle espérance : à ceux qui ont péché, tu accordes la conversion ». Il me vient en tête un refrain du credo en français qui dit ainsi:  » Je crois en Dieu qui croit en l’homme ». Très beau! Dieu nous aime non pas malgré notre malice et notre aveuglement, mais à cause d’eux, c’est-à-dire : en proportion de notre misère.

Certes, l’ivraie n’entrera pas dans le Royaume; ce n’est qu’à la moisson, c’est-à-dire quand le bon grain sera définitivement à l’abri, qu’elle sera arrachée et brûlée. Car ce n’est qu’au terme d’une vie qu’on peut en faire le bilan et encore : pas à la lumière de nos critères humains, à la lumière de ce que l’Esprit seul peut révéler, lui qui connaît le fond des cœurs, comme nous l’avons entendu dans la 2ème lecture. C’est donc la décision du « Maître du champ » de les laisser pousser ensemble jusqu’à la moisson, jusqu’au jugement que Lui-même se réserve. En attendant, il nous révèle sa patience. Suis-je conscient que j’en bénéficie moi-même, moi au cœur dont les racines de blé et d’ivraie sont nouées ensemble? Suis-je aussi conscient qu’il y aura un jugement à la fin, et en tenir compte dans ce que je fais? Dans l’explication de la parabole, Jésus précise bien que ce ne sont pas les serviteurs qui moissonnent mais les Anges de Dieu.

Laissons donc le temps et la grâce faire leur œuvre. La graine du Royaume, (une seule!) minuscule aux yeux des hommes, à vrai dire à peine perceptible pousse dans le secret des cœurs. Mystérieusement, le levain du Royaume se diffuse dans la pâte humaine et la travaille au plus profond. Même si nous ne percevons pas de changement spectaculaire, il fait pourtant insensiblement lever la pâte. La moisson aura bel et bien lieu, dit le Maître avec un bel optimisme, certain des réjouisssances futures des moissonneurs. Reste à calmer notre impatience et à laisser le semeur lui-même opérer le tri que nous prétendons faire avant l’heure, à sa place.
Voilà le lieu de notre combat : la foi en l’action cachée du Royaume dans la durée. Ne laissons pas ici sommeiller notre foi. Pendant ce sommeil risquerait fort bien d’intervenir le Malin. Notre manière de contribuer à l’avènement du Royaume c’est précisément de rester vigilant dans cette foi.

« La foi est une vie qui se sème, germe, grandit et fructifie,… non sans obstacles»

Chers amis,
Pendant ces trois dimanches qui suivront, nous méditerons sept paraboles que Matthieu a groupées dans le troisième grand discours de Jésus. En cette occasion, Jésus se trouve dans un tournant déterminant de son ministère : il se heurte aux difficultés comme nous avons eu l’occasion de le méditer ce dernier dimanche. Il se heurte à l’hostilité directe des chefs religieux qui veulent l’enfermer au sein des discussions de leurs écoles théologiques, ils veulent même le supprimer. En outre, les foules, après l’enthousiasme des débuts de la prédication de Jésus, sont déçues par ce messie qui refuse de passer à l’action politique pour libérer ce peuple du joug des Romains. Jean le Baptiste était de ceux qui attendaient une telle libération : « déjà la cognée se trouve à la racine des arbres ; tout arbre donc qui ne produit pas de bon fruit va être coupé et jeté au feu (…) il tient e main la pelle à vanner (…), quant aux bales, il les consumera dans un feu qui ne s’éteint pas » (Mt 3,10…12). Voilà qui on attend. Mais que se passe-t-il ? Ecoutons la parole.

La 1ère lecture rappelle aux rescapés de l’exil qui s’apprêtent à repeupler Jérusalem qu’une seule voie conduit au bonheur : l’accueil de la Parole de Dieu, qui ne déçoit jamais. Elle est féconde et efficace comme les précipitations qui abreuvent la terre. Dans la parabole du semeur, la Parole de Dieu est comparée aux grains qui tombent sur différentes sortes de terrain. L’évangile de Matthieu insiste sur les grains perdus, picorés par les oiseaux, brûlés par le soleil ou étouffés par les épines. Ces images visent les difficultés d’une vraie conversion et les obstacles que rencontre l’annonce de la Bonne Nouvelle. Mais la puissance de Dieu se manifeste dans les grains tombés sur la bonne terre, qui rachètent superbement les partes subies par ailleurs.

Ainsi, la première lecture de la liturgie de ce dimanche souligne fortement l’efficacité de la Parole de Dieu en nous et dans l’histoire des hommes : « …ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce que je veux, sans avoir accompli sa mission. »
Cependant, pour que la Parole de Dieu porte un fruit qui dure, la terre qui l’accueille doit être bien préparée. C’est ici le message que nous laisse la parabole du Semeur que Jésus nous présente dans l’évangile de ce jour. Certes, la Parole de Dieu est toute puissante mais elle ne s’impose pas, elle demande à être accueilli librement et pour que sa semence grandisse en nous, elle doit trouver un cœur bien disposé.

Pouvons-nous dire que malheureusement, cette Parole nous atteint en paraboles? Certainement non! Elle nous est ainsi adressée pour solliciter notre libre adhésion. En effet, devant quelque chose d’évident, il est difficile d’être libre. Dieu veut mettre en mouvement notre liberté qu’il nous parle en paraboles. Par ailleurs, les réalités divines sont si riches qu’il est difficile, sinon impossible, de les enfermer dans notre pauvre langage. Il faut des images qui alors engagent notre imagination, il faut des paraboles qui mettent en mouvement notre liberté. Dans cet épisode du semeur, la qualité du sol sera comparée à notre prédisposition à coopérer à la germination, la croissance et la fructification de la semence jetée en nous. En effet, la foi est une vie qui se sème un jour, germe, grandit et fructifie, non sans difficultés et obstacles qui pèsent sur notre liberté d’y adhérer.
Revenons successivement sur quelques aspects. « Le semeur est sorti pour semer », nous dit la parabole. Jésus est « sorti de la maison » pour enseigner les foules et ses disciples. Nous pouvons lire dans ce mouvement de sortie toute la dynamique de l’Incarnation. Tout comme la semence a jailli des mains du semeur pour être jetée en terre, le Verbe, Parole vivante, a lui aussi, de la même manière, été envoyé par le Père pour se faire chair et venir féconder la terre de notre humanité.
En lui, le Royaume de Dieu s’est fait proche de tout homme. Car de même que la semence a été envoyée par le semeur sur tout type de terre, qu’elle soit rocailleuse, chargée d’épines ou bien labourée, de même le Père a envoyé son Fils frapper à la porte du cœur de tout homme que ce cœur soit épineux, dur comme la pierre ou prêt à s’ouvrir, ou peut-être un peu des trois. En tous cas, des obstacles qui pourraient décourager ne manquent pas.

C’est cela qui a caractérisé le peuple de Dieu, déçu de ne pas voir s’accomplir les promesses annoncées par les prophètes. Les déconvenues qui ont suivi le retour de l’exil ont fait ressentir tout particulièrement cet apparent échec des promesses du Seigneur. Le Créateur qui a disposé la pluie fécondante pour assurer la nourriture de l’homme serait-il moins efficace pour accomplir ce qu’il a promis. La première lecture y répond, et l’évangile nous le confirme en soulignant l’espérance qui anime le semeur, malgré les difficultés réelles qui pourraient paralyser son activité. Il s’y met alors.

Le semeurLe semeur de la parabole, que l’on ne peut soupçonner de maladresse, fait manifestement preuve d’une extrême largesse. C’est comme s’il ne voulait oublier aucun coin de terre, si petit soit-il, où sa semence pourrait germer.
La semence a son origine dans l’espérance du semeur parce que personne n’ensemencerait s’il n’entretenait pas la confiance de récolter un jour du fruit. Mais, en même temps, la semence alimente l’espérance. Quand le semeur commence à ensemencer, il est rempli de joie et d’espérance en voyant réalisée dans le futur la promesse de son travail. Il fixe son regard pas tant sur le travail présent avec son lot de fatigue et de sueur mais sur la promesse d’une belle récolte. Il ne veut oublier aucun coin de terre, si petit soit-il, où sa semence pourrait germer. Ceci est une leçon d’espérance. Quand tu regardes ta pauvre vie, quand tu regardes la vie de l’Eglise, ou le monde, n’en restes pas aux constatations pessimistes et découragées : malgré tous les échecs, une récolte se fera. Soyons témoins de l’espérance. Tel est l’une des attitudes que nous inspirent les lectures de ce jour.

De même, notre Seigneur porte un regard d’espérance sur chacun et sur l’œuvre en lui de sa grâce. Nonobstant un terrain irrégulier, qui n’offre aucune garantie, il continue à semer jusqu’à ce qu’une de ses semences trouve un endroit bien disposé pour la recevoir et se laisser féconder. Et quelques mois plus tard la semence commence à produire son fruit, là trente, là soixante, là cent pour un. C’est la confirmation qu’il avait raison de semer avec générosité et grand sacrifice. Un semeur qui prévoyant qu’une partie de son grain ne germerait pas parce qu’il serait tombé hors d’un terrain bien préparé renoncerait à semer ne ferait que se comporter de façon insensée.

Cependant, la générosité du semeur dans ses semailles n’enlève rien au fait qu’il s’agisse d’avoir un terrain bien disposé pour accueillir la semence et lui permettre de porter un fruit qui demeure. A partir du moment où la semence est jetée, à partir du moment où le Royaume s’est approché et que Jésus est sorti pour annoncer l’avènement des temps messianique, chacun se trouve engagé et jugé par cette Parole. Autrement dit, il ne peut que se situer par rapport à elle. Il ne peut rester neutre. Les deux types de résultat de la semence posent bien ce problème en révélant la dualité de l’auditoire de Jésus, c’est-à-dire la possibilité qu’il lui est laissée de refuser ou d’accueillir la parole du Maître. « Celui qui a des oreilles qu’il entende ! ». La liberté de l’auditeur est interpellée ! La parabole du Semeur nous invite à examiner notre vie. Quel type de terrain suis-je ? Quel type de terrain est-ce que j’offre à la Semence de sa Parole ?

La question soulevée par les textes de la liturgie de ce dimanche est celle de notre libre collaboration à l’œuvre de la grâce divine en nous. Dans la deuxième lecture, saint Paul nous dit que celle-ci ne se fait pas sans douleur. La croissance des prémisses de notre résurrection, déposés en nous au baptême, passe nécessairement par un consentement douloureux dans la mesure où notre liberté reste marquée par les conséquences du péché des origines. L’image de l’enfantement utilisée par saint Paul qui provoque dans le même temps joie et douleur exprime particulièrement bien notre situation ici-bas. Plutôt que de reprocher à Dieu de ne pas intervenir dans nos vies ou d’agir trop lentement, peut-être serait-il plus juste et plus fructueux de nous émerveiller devant sa patience et la générosité de sa grâce envers nous.

« Seigneur, puissions-nous trouver dans l’Eucharistie et dans la méditations des textes de ce dimanche le désir et la force de mener une vie chrétienne plus authentique et plus engagée, fondée sur l’efficacité de ta Parole et sur la responsabilité qui est la nôtre face aux dons reçus de toi et la nécessité de porter du fruit. Ainsi soit-il. »

%d blogueurs aiment cette page :